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Sex, drugs and musique pré-romantique

6 juin 2015

Mes petites loutres, Aujourd'hui,je suis

Mes petites loutres,

Aujourd'hui,je suis fatiguée. Épuisée. Lessivée. Parce que figurez vous que n'étant pas recevable à l'oral du contrat doctoral, je n'en aurai pas (jusque là, logique). Ce qui signifie que mon petit job d'été chéri commencé il y a deux semaines dans une grande enseigne de vêtements va durer bien plus qu'un été - si je suis prise. Sinon, je devrais encore passer par la case recherche de job étudiant, et dans tous les cas continuer à travailler en parallèle de ma thèse.

Là où ca devient compliqué, c'est que si la thèse est crevante intellectuellement, le taf est crevant physiquement. Hors, quand on est crevé physiquement, on a plus très envie de faire des tâches hautement intellectuelles. Ce qui fait que depuis deux semaines je n'avance que laborieusement sur mon projet qui pourtant me tient tant à coeur. Alors oui, on est des tonnes à devoir faire ça, mais moi même personnel j'ai bien envie de m'en plaindre, parce que c'est mon blog et je fais ce que je veux. J'ai envie de dire :

Mis à part ça, j'ai encore suffisamment d'énergie seulement pour parler vite fait d'une de mes oeuvres de théâtre musical préférées (quant à savoir si en français le genre s'appelle également théâtre musical, c'est un mystère que je souhaiterais voir éclairci). Il s'agit de Nijinskys Tagebuch de Detlev Glanert (Le journal de Nijinsky en VF): Ledit Nijinsky a donc fini sa vie à l'asile, et dans cette oeuvre il est représenté par deux chanteurs, deux danseurs et deux acteurs. C'est un peu une version fragmentée de ses pensées, et c'est beau, voilà. J'en parlerai plus longuement plus tard. Tadaaaa

 

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22 mai 2015

Mes petits oiseaux des îles, On est de nouveau

Mes petits oiseaux des îles, 

On est de nouveau restés un bout de temps sans se causer, pas vrai? Il se trouve que j'ai été fort occupée à démissionner de mon boulot et à revenir dans ma petite Nancy pour faire une thèse. Ouais, je suis comme ça. Je n'ai jamais réussi à m'adapter à Paris, et grand bien m'en fasse, je ne suis pas devenue le genre de personne qui bouscule tout le monde dans le métro avec un regard méprisant. Je ne peux pas cracher sur le boulot : j'ai vécu des trucs formidables (cf le gala à l'Opéra Comique avec Antonacci et Petibon), mais aussi des trucs beaucoup moins formidables (cf les photocopies). Ma piaule avait beau être follement romantique, je me sens mieux ici. Et puis faire une thèse c'était un petit peu mon ambition à court terme, alors on peut dire que je suis retombée sur mes pattes. Mais je ne suis pas ici pour raconter ma iev'. 

Aujourd'hui, j'ai envie de râler et d'enfoncer des portes ouvertes. Il y a un soucis avec la Traviata. Parce que j'aime cet opéra de tout mon cœur (et j'envisage de me faire tatouer un camélia dans la nuque en référence au bouquin), mais que malgré cela, il y a une scène, voire carrément une portion de dialogue, qui me hérisse les poils pas parce que je suis émue, mais parce que tel le chat sauvage des balkans, je m'apprête à bondir pour bouffer tout le monde (ou au moins, Verdi et son librettiste). Bon, d'accord, j'en ai rajouté. Mais ce qui me gâche le plaisir, c'est que cette histoire, malgré ce qu'on veut nous faire croire, n'est pas basée sur l'amour pur et magnifique éclatant entre deux êtres fous l'un de l'autre, mais le fait d'une manipulation par un petit pervers narcissique un peu trop insistant et de plus intolérant à la frustration. Autrement dit, aujourd'hui je le dis haut et fort : Alfredo, t'es qu'un con.

Nous prendrons comme preuve de ce que j'avance le dialogue entre Alfredo et Violetta à l'acte I, scène 3 : Violetta, en pleine orgie (a peu de choses près) avec du beau linge, a la bonne idée de commencer à agoniser, ce qui ne surprend personne puisqu'elle leur fait le coup tous les soirs, non pas parce qu'elle est une drama queen en demande d'attention, mais bien parce qu'elle est … Mourante. Héroïne verdienne oblige, tout ça. Note : si pour toi cette information était un spoil, tu me feras le plaisir d'aller jeter un œil sur le livre ou une oreille sur l'opéra (voire un œil et une oreille, il y a même des versions sur le net) (même si je préférais que tu bouges ta couenne jusqu'au Wiener Staatsoper, et qu'au passage tu me payes le voyage parce que t'es quelqu'un de sympa) (on pourra boire du champagne au foyer et se plaindre que la décoration est bien trop surchargée). Ce dialogue entre les deux protagonistes m'énerve. Portion : 

ALFREDO
Oh, se mia
foste, custode io veglierei pe' vostri soavi dì.

VIOLETTA
Che dite? Ha forse alcuno
cura di me?

ALFREDO (con passione)
Perché nessuno al mondo v'ama.

VIOLETTA
Nessun?

ALFREDO
Tranne sol io.

Vulgairement : si je m'occupais de toi, tout irait vachement mieux parce que je suis le seul au monde qui t'aime. Et personne d'autre. Tu le sens, le gros malaise du manipulateur? Ok, elle est avec des gens qui la laissent se bourrer la gueule alors qu'elle a la tuberculose et que le mieux pour elle serait une tisane et au lit. Mais le soucis, c'est que sa justification pour réclamer son amour, c'est que personne ne l'aime. Et il est persuadé d'être dans son bon droit quand il dit ca – je t'aime comme personne ne t'a jamais aimé, donc je mérite d'être aimé en retour. C'est un peu le complexe de Quasimodo, sauf que Quasimodo est sympathique et n'insiste pas. Alors qu'Alfredo/Armand va la poursuivre jusqu'à ce qu'elle réalise qu'en fait, oui, elle le kiffe en retour. Mais elle l'aime parce qu'il l'aime – elle aime ce qu'il voit, elle s'aime à travers lui. On a donc sublimé une histoire d'amour qui n'en est pas vraiment une à la base. Je vois plus la Traviata comme une lutte d'égos que comme une histoire d'amour. Au début, Violetta est une femme libre, aux amours multiples, qui profite de sa courte vie pour la mener comme bon lui semble. Par la suite, c'est un petit chaton. Le ressort dramatique, c'est la maladie de Violetta : quelque part, plus que sa condition de courtisane, c'est cela qui l'empêche de s'élever vers un quotidien plus tranquille. Elle sait que le temps qui lui reste est court, et en profite pour vivre de la manière la plus gaie possible. Mais c'est une fois que l'amour de l'autre apparaît qu'elle apprend à vivre sainement. Non pas l'amour d'elle même, mais bien l'amour que l'autre lui porte. Logique? Je ne crois pas. Encore une fois, nous sommes enfermés dans un genre de complexe du prince charmant, qui apporte un sens à une vie qui jusque là en était vide. Amor è il palpito del'universo. Etc. 

Alors ok, ensuite elle l'aime aussi et s'en prend plein la gueule pour lui, mais quand même, de base, c'est un peu inégal comme rapport, non? Après, on m'a récemment soufflé dans l'oreillette que puisqu'ils s'aiment après, c'est pas si grave. Ce qui n'est pas entièrement faux. Mais je voulais pigner. Et continuerai à écouter le premier acte de cet opéra tous les soirs avant de sortir même si il y aura toujours quelques paroles qui m'énerveront. 

On regardera la version avec Villazon et Netrebko pour la mise en scène dépouillée, et celle avec Castronovo et Dessay parce que Castronovo EST UNE PUTAIN DE BOMBE DE SEXE. Et parce qu'il y a des paillettes. 

 

26 novembre 2014

Dites donc, les petits chats, ça fait drôlement

Dites donc, les petits chats, ça fait drôlement longtemps ! Il faut dire qu'entre temps, le chemin sinueux de la vie m'a détourné de la ville impériale (que je continuerai toujours à porter dans mon coeur, il s'entend) pour m'emmener vers des contrées bien plus grises et pluvieuses, mais qui possèdent également leur charme. Parfois.

La dernière fois qu'on s'est causé, si vous vous souvenez bien, je galérais brillamment mon master de musicologie, que j'ai depuis terminé. Et que faire après un master de musicologie? Le bon sens et mon envie me portaient vers la thèse, sauf que ... J'ai eu les jetons. Mais genre, grave. Alors, je me suis dit, "Courage, fuyons", et suis allé pleurer dans les bras de mon directeur (à peu de choses près) qui m'a suggéré une solution temporaire : devenir bibliothécaire d'orchestre. Vous n'êtes pas des chatons complètement stupides, mais à ces mots, vos pupilles s'équarquillent, et vient la question "Mais qu'est-ce donc que cette profession étrange?". Ou : "Mais qu'eeest-ce qu'elle est encore allé chercher?", c'est selon, je critique pas. Je répondrai de manière développée à cette question ultérieurement, parce que là j'ai la flemme, et que c'est pas de ça que voulais parler: 

"Mais qu'est-ce qu'elle nous veut, alors?" Public, j'entends ton cri unanime, et vais satisfaire ta curiosité incessamment sous peu. Aujourd'hui, nous allons un peu parler de la contrée grise et pluvieuse précédemment mentionnée, j'ai nommé : Paris. 

Quand j'étais adolescente (il y a donc à la fois des siècles et cinq minutes), je n'avais qu'un rêve : partir un jour habiter à Paris. Ah, Paris. Pour la petite nancéienne que j'étais, ces deux syllabes suffisaient à éveiller des milliers d'images plus clichées les unes que les autres, et c'était la seule ville qui me paraissait digne de recevoir mon auguste personne. Spoiler : je me foutais le doigt dans l’œil jusqu'à l'omoplate (parce que c'est pas non plus jusqu'à des profondeurs abyssales, mais c'est un peu loin quand même, et suffisant pour être plutôt dérangeant). Quand j'ai commencé mon master, c'est devenu l'inverse : je voulais bien habiter n'importe où – je devais habiter n'importe où ailleurs que dans ma ville qui me paraissait bien trop petite -, mais pas là-bas. Je voulais une capitale ou au moins une très grande ville, mais Paris, jamais. Surtout : les parisiens, jamais.

Et puis un jour, j'ai décidé de devenir partothécaire (oui, on peut dire comme ça aussi, le blog est ludique, le blog vous apprend des jolis mots). Ça s'éloignait pas mal du plan de base qui était d'être une maîtresse de conférence internationale ment réputée, mais ça correspondait pas mal à mes aspirations (pour en savoir plus sur lesdites aspirations, t'es gentil mais je suis pas en entretien d'embauche). Alors, il a fallu chercher un apprentissage. Alors, j'ai eu le choix entre un orchestre et un conservatoire, et je me suis dit que travailler avec un orchestre me plairait plus – au pif, hein, parce qu'à l'origine je n'en savais pas énormément sur le métier, à part que ça avait l'air bien. Alors, je me suis retrouvé à … Paris. Et vous écris, mes chatons, en direct de mon palace/placard, dans lequel je suis installée depuis maintenant deux mois. 12m2 et vue sur la Tour Eiffel (bien que j'ai l'impression d'être la seule personne au monde à trouver cette petite chose sans grand intérêt). Des fois, quand mon chauffage ne fonctionne pas, j'ai l'impression d'être dans La Bohème, et je gambade en chantant qu'on m'appelle Mimi (et après je me rappelle que fumant comme un petit pompier, je ne peux pas vraiment me permettre de chanter quoi que ce soit en ce moment). Des fois, quand je monte mes étages sans ascenseurs, je redeviens presque punk, rapport au fait que mon immeuble est divisé clairement en riche et pauvres (enfin, TRÈS riches et moyen pauvres) et que ça me donne un peu envie de leur faire manger leur hall d'entrée en marbre. Mais moi, au moins, j'aurai de belles fesses - et si j'avais reçu un euro à chaque fois qu'on m'a dit ça je pourrais commencer à économiser pour migrer de l'autre côté de l'immeuble. 

Sinon, les parisiens, c'est bien moins pire que ce que je pensais: À part quand ils me sortent des absurdités géographiques sur mon petit Nancy, qui se trouve parfois à la frontière suisse (presque), parfois en Bretagne (presque presque), et est idéal pour faire du ski. Ils sont même plutôt gentils, pour l'instant. Peut-être parce que j'ai encore rencontré peu de parisiens pure souche. Je reste méfiante, et vous tiens informée. Je ne suis pas encore amoureuse de la ville comme tant de gens ont l'air de l'être et il faut admettre que c'est très frustrant. C'est ça d'avoir laissé son coeur à Vienne. Peut-être qu'avec le temps je n'aurai plus envie de repartir. Qui sait.

 

 

7 janvier 2014

Ah, mes chatons. Percevez dans ce soupir le

Ah, mes chatons. Percevez dans ce soupir le désespoir d´un coeur cherchant à s´épancher face à l´immensité du désespoir qu´il contient. 

Ce n´est pas ici de l´histoire de mon premier retour en France qu´il s´agit, bien qu´il ait été jalonné de drames émotionnels en veux-tu en voilà et même d´un bref retour de ma jumelle maléfique, soit, le moment où la (presque) douce Bérengere devient subitement l´hystérique BérAngere - apparemment elle crèche toujours à Nancy et elle est toujours insupportable. Mais je suis de retour dans la patrie des Kaisersemmeln mit Käse, et bien que toujours au bord de la Liebestod, je suis redevenue un être humain. Alors, quel est donc la source de mon trouble, se demande le public en émoi?

Il se passe que, les mecs, la vie, c´est pas du foie gras : jeudi commence la période la plus atroce de l´année universitaire, soit, les partiels. Il faut savoir que je suis d´un naturel légèrement stressé, et que ceci est l´euphémisme de l´année, qui ne fait pourtant que commencer. C´était le cas lorsque je passais des examens sur des sujets que je maîtrisais dans ma langue maternelle. Hors, je vais pendant plusieurs semaines être évaluée sur des sujets sur lesquels mes connaissances ne sont point vastes, dans une langue que j´ai commencé à apprendre cet été en théorie, en commençant les cours en octobre en pratique. Qui est l´abrutie qui fait son Erasmus en partant avec un niveau A0? Évidemment, le challenge, c´est bien, c´est beau, c´est la vie, mais j´ai peut-être mis la barre un peu haut. Et quand je me revois me blottir sous mes couvertures un mois á l´avance en souhaitant mourir pour un petit partiel de paléographie médiévale l´année dernière, je me dis qu´il est anormal que mon coeur n´ait pas encore arrêté de battre alors que je me prépare à parler des théories esthétiques de Kant, Hegel et Adorno dans la langue de Goethe - voire pour être plus géographique dans la langue de Grillparzer, ou de DJ Ötzi. 

Soyons réalistes : il est possible que je me plante, et que je connaisse les rattrapages, voire, que je rate mon année, voire, que je rate ma vie. J´essaye de garder mon angoisse á des proportions raisonnables, en me récitant la liste des gens intelligents que je fréquente qui ont néanmoins raté un semestre / une année / changé d´orientation, et sont donc á un niveau d´étude inférieur ou égal au mien pour un âge égal ou supérieur, pour me convaincre que même si je perds un an, je suis toujours dans la norme, que je devrais déjà être contente d´être en M2 à presque 22 ans, et que le valider cette année ne serait que la cerise sur la Sachertorte (ça va pas ensemble et j´aime pas la Sachertorte mais j´aime faire des références culinaires autrichiennes). Mais en même temps, la partie de moi qui adore me taper dessus me rappelle que j´ai un jour validé une année en passant en parallèle mes examens de solfège et piano, jouant dans les pièces de fin d´année du conservatoire et en travaillant au royaume de la frite 20 heures par semaine, donc, que ne pas réussir un semestre où je n´ai que 9 cours par semaine, ce serait le summum de la loose. 

Et bien entendu, je ne pense pas seulement au fait que si je rate mon année, je redouble. Non, la chose qui m´obsède, c´est : si je rate mon année, je ne suis pas faite pour ça, autant changer d´orientation tout de suite. Relativiser, c´est pour les faibles. Jugement que je n´applique évidemment pas sur les autres, qui me paraîtront toujours mieux partis pour réussir dans la vie quand bien même ils vivraient des milliers d´échecs et d´errances. Je crois que les études m´ont volé mon auto-estime. Je crois que je vais retourner faire des frites. Quoique, les tests pour faire carrière dans le milieu sont pas évidents non plus. Fichtre. Si se rouler en boule dans un coin en se lamentant était une discipline universitaire, j´aurais peut-être une perspective de carrière tangible. 

En attendant, je vais réviser, et bientôt, tout, je saurai tout sur ... La musique populaire en Europe, sa conservation et sa diffusion par les médias. J´ai prévu de parler de Kundera, ça devrait me porter un peu bonheur. 

 

23 novembre 2013

Mes petits ratons-laveurs (je fais un peu la

Mes petits ratons-laveurs (je fais un peu la gueule aux loutres depuis que j´ai appris qu´elles violaient des cadavres de bébés phoques, mais comme je suis pas rancunière, ça devrait passer),

Aujourd´hui, parlons peu (non), parlons bien (non plus), parlons travail (plus ou moins). 

J´avais pour projet de balancer mes dernières réflexions sur un sujet susceptible d´être intéressant pour une frange de la population plus conséquente qu´usuellement . Effectivement, depuis que j´ai emménagé ici, le fait de vivre en colocation me permet de regarder des films d´horreur. Parce que, ne nous leurrons pas : j´essaye de renvoyer une image un minimum badass pour compenser ma passion des chatons, j´ai abandonné les claques au profit des coups de poings depuis quelques années et je bois mon whisky pur comme un cow-boy, mais en vrai, je suis une méga trouillarde. Du genre à regarder dans mon placard le soir avant de me coucher. Voire, à dormir avec la lumière allumée. Je ne crois pas au surnaturel, parce que je refuse d´y croire, parce que ça fait peur. Mais en même temps, j´aime avoir peur. D´oú, problème. Pendant mes deux premières années de fac, quand j´habitais seule, je ne pouvais même pas écouter Varèse le soir, c´est dire. Mais ensuite, vu que jusqu´à mon départ pour la meilleure ville du monde j´avais régulièrement  à disposition des bras virils dans lesquels me réfugier si j´avais abusé de pages creepy sur les maisons hantées, je suis progressivement tombée dedans - la grande, la merveilleuse, la magnifique Jack Parker de Madmoizelle et ses vidéos ayant achevé le travail. Et maintenant, c´est foutu, la présence rassurante de mes colocs et la fréquentation de personnes partageant mon affection pour le glauque m´ont transformé en cette créature hybride qui m´a toujours énervée, la meuf qui regarde des films d´horreurs avec une main devant les yeux, un jeu digital subtil permettant de cacher alternativement les parties de l´écran  il y a un truc qui fait peur (merci aux quelques années de piano au conservatoire m´ayant permis d´aquérir cette dextérité). 

Alors fatalement, on a fini par regarder le film dont la bande-annonce m´a tellement fait flipper que je mourrais d´envie de le voir. Insidious. Même si ma technique m´a permis d´éviter des détails qui m´auraient sûrement traumatisés à vie, j´ai vu une grande partie, à cause de laquelle je suis à présent partagée entre voir le 2 le plus vite possible parce que c´est absolument génial, et appeler ma maman pour qu´elle me raconte l´histoire des trois chatons qui ont perdu leurs gants (ce sera le sujet d´un autre récit passionnant, ce livre étant un gros point d´interrogation dans mon enfance - spoiler : les chatons ont besoin de leurs gants pour manger des gâteaux et des bonbons. Les auteurs de livres pour enfants sont des drogués) jusqu´à ce que j´arrête d´avoir peur. 

Mais en quoi cela concerne-t-il mes lecteurs friands de vulgarisation musicologique? Ahah. On a tendance à considérer le cinéma d´horreur comme un sous-genre moins intéressant que le Vrai Grand Cinéma. Ce qui est en quelque sorte logique, vu qu´il ne s´adresse pas à tout le monde - quand à trouver quel genre s´adresse vraiment à tout le monde, ceci est une autre question, et comme je suis une bite en culture cinématographique, je n´essayerai pas d´y répondre. Pourtant c´est un genre riche, avec ses codes, ses classiques, ses acteurs. Comme le porno, tiens. Mais c´est pas le film familial du dimanche. Ceci dit, si l´autre choix était Bienvenue chez les Ch´tis, je ne sais pas ce qui est mieux pour le développement des enfants. Bref. Du coup, c´est un pan de culture sur lequel on aura moins facilement tendance à se pencher quand on veut se contenter de la culture cinématographique de base. C´est un peu comme dans mes cours d´histoire de la musique de licence, dont le but était de nous donner une base culturelle assez large dans le domaine, et dont la ligne directrice était par conséquent la musique dite "classique" dans le sens "rayon classique de la fnac", ce qui va environ du chant grégorien à la musique électroacoustique en passant par mon pré-romantisme vénéré, ce qui nous a forcé à passer à coté du développement de genres musicaux non moins intéressants (très peu de musique populaire hors réutilisation de matériau populaire dans la musique classique) mais ne rentrant pas dans le cadre fixé; normal, déjà qu´en traversant environ 11 siècles en trois ans on a plus que survolé pas mal de choses, on est resté dans le basique. Parenthèse, après ça, faire un M2 Musicologie à Vienne c´est la fête du slip, j´ai pu avoir des cours sur le disco allemand, les bardes écossais, la dévotion mariale ou la pornographie dans l´opérette, et je réalise qu´en n´ayant qu´une seule vie je n´aurai probablement même pas entendu un dixième de ce qui a fait l´histoire de la musique; c´est un peu comme prendre conscience de la taille de l´univers mais en moins effrayant.

Tendance donc á n´inclure dans la culture générale artistique que ce qui fait partie de la "grande" culture. Ce qui est une bonne base, mais contribue parfois à nous mettre des oeillères, et c´est fort triste, comme mes récentes expériences horrifiques me l´ont montré. En commençant à regarder ces films, j´ai par exemple été frappée par la créativité dans la manière de filmer - exemple type : la fin de Los ojos de Julia, filmée avec pour lumière le flash d´un appareil photo. Moi et ma novicité, on a trouvé le résultat dingue. D´oú transition vers ce qui nous intéresse : la musique. Cette. Putain. De. Musique. D´oú transition vers le "j´avais pour projet" qui ouvrait ceci (oui, tout ça pour ça): pour parler de la BO d´Insidious, il aurait fallu que je la réécoute. Pour que je la réécoute, il aurait fallu que mes colocs ne soient pas en cours, et que la nuit ne tombe pas á 16h. Alors je vous laisse vous régaler tous seuls, le compositeur c´est Joseph Bishara et vu son CV, on comprend qu´il connaisse bien son affaire.

Comme je suis gentille, j´enchaine sur un sujet qui n´a rien à voir et ne vous fera pas faire de cauchemars. Par contre, moi, si. Ça s´appelle "Ossian et Schubert" en attendant de trouver un nom qui pète plus et qui correspondra mieux à ma problématique, ça va me rendre chauve, autrement dit, c´est mon mémoire. Un jour j´expliquerai en détails les tenants et les aboutissants de cette bien belle histoire, mais pas aujourd´hui, je dois acheter des pizzas. En gros, il s´agit de 9 lieder composés par - je vous laisse deviner, entre 1815 et 1817, et dont personne n´a rien à foutre. Forcément, puisque le mec a aussi mis en musique les plus grands poètes de son époque, et même si j´aime Ossian de tout mon coeur, il faut admettre qu´à coté de Goethe, la traduction de Harold utilisée pour les lieder ossianiques est bien bien nulle. La légende dit d´ailleurs que les potes de Schubert se foutaient de sa gueule quand il se mettait au piano pour les chanter. Et même si se foutre de la gueule de Schubert qui chante Mädchen Inistores c´est la classe, il en reste que ces 9 pièces sont de nos jours peu enregistrées, et encore moins jouées, pour plusieurs raisons compréhensibles - Die Nacht qui selon moi justifierait à lui seul de redécouvrir cet ensemble a cependant une construction que plusieurs ont qualifiée de foireuse (non, pas en ces termes, les vrais musicologues sont polis).

Et puis il y a la raison que je trouve atrocement triste, et que j´avais déjà avancée l´année dernière lorsqu´il s´agissait de comprendre pourquoi on se souvient à peu près des oeuvres orchestrales qui ont été influencées par Ossian (Die Hebriden de Mendelssohn, Souvenirs d´Ossian de Gade), alors qu´on a totalement oublié la production vocale, qu´il s´agisse d´opéras, de lieder ou de cantates, bien que de grands noms s´y soient intéressé (Schubert, donc, mais aussi Brahms et un peu Donizetti; pour la fierté nationale, Ossian ou les Bardes de Le Sueur EMPIRE RPZ - cet opéra réussissant l´exploit de réunir les pages les plus plates écrites pendant cette période avec le passage du Songe d´Ossian ; 10 minutes superbes pour 3 heures d´emmerdement, un ratio rappelant métaphoriquement la difficulté de l´existence). Pourquoi? Parce qu´Ossian est passé à la trappe - en tout, j´ai rencontré quatre personnes qui connaissaient ce nom. Sachant que je parle de mon mémoire à toute personne avec qui je communique pendant plus de 5 minutes, en gros. Vu que les textes sont remplis de références á des lieux / personnages / situations, et que progressivement plus personne ne les a comprises, VTFF Ossian. 

Je dis : Non. Et je dis : merci chaine Youtube. Ils ne sont pas tous bons, il n´y en a que 5, mais ils sont là, et il y a Cronnan, et Cronnan c´est superbe et ça parle d´amour et même si l´amour pas pour moi comme le disait Carla Bruni avant de se marier avec l´autre, c´est bien beau - et si tu peux faire mieux, IMSLP est ton ami, toutes les partitions sont disponibles, fais toi plaiz, comme ça j´arreterai de les massacrer déchiffrer pas très top. Toi aussi, viens du coté ossianique de la force. 

En plus on a des pizzas, du coup. 

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6 novembre 2013

Mes petites loutres sauvages, Je dois admettre

Mes petites loutres sauvages,

Je dois admettre que ce début de semaine ne fut pas facile. Effectivement, récemment, de charmants jeunes mâles ont décidé de s´attaquer à un problème de société par la manière forte : un site internet prônant le retour aux bonnes vieilles valeurs de notre société, encore trop patriarcale pour toutes personnes possédant un cerveau, mais plus suffisamment pour ces créatures échappées d´un temps lointain où la fâme ne pouvait s´intégrer qu´en étant mince (et par mince, j´entends, 1m70 pour 50 kgs – ce que je ne critique évidemment pas, chaque corps étant beau dans son unicité, mais ça place mon IMC tout à fait normal d´environ 22 dans la catégorie d´obese morbide, ce qui est passablement stupide), capable de procréer (même si certaines filles répondant aux critères précités sont en parfaite santé, beaucoup sont à  ce stade aménorrhées, ce qui complique légèrement le fait d´offrir une descendance à ces spécimens, de toute évidence éminents mathématiciens puisque les hommes sont forts en maths) et toujours disponibles pour faire un sandwich à leur mâle dominant (ça tombe bien, c´est à peu près la seule chose que je sais cuisiner correctement. Comme je ne veux pas d´enfants, ça fait 1/3, peut-être que je trouverai un mari?), un site internet, donc, nous offrant ce beau programme, a lancé la semaine du Fat Shaming. Pour vous éviter Google Translate, c´est, en gros, la stigmatisation du gros/gras. Comme rien que le fait de l´écrire me remet les nerfs, je vous laisse faire vos petites recherches tous seuls comme des grands.

Dans la foulée, j´ai découvert plusieurs sites et pages dénonçant cette culture du body shaming, A.K.A. que tu sois gros(se) ou mince, tu ne seras jamais assez parfait, coltine toi quelques années de TCA, et peut-être que tu auras souffert suffisamment pour qu´on te trouve généralement correct. C´est beau, non? Depuis quelques mois, j´ai tendance à oublier cette atroce dictature du physique parfait qui pèse sur nous – et je n´entends pas par là uniquement les femmes „á formes“ : j´ai eu des copines trop minces, des copains trop minces, des copains trop gros. Dans ma belle contrée d´adoption, je dois l´avouer, on s´en bat un peu la nouille : la „norme“ pondérale est plus élevée qu´en France, le harcèlement de rue (qu´on parle de „Mademoiselle t´es charmante“ ou de „Eh le boudin t´es moche“) est quasiment inexistant. Je ne vais pas prétendre que Vienne est le pays des Bisounours, mais il s´en rapproche quand même plus que ma petite Nancy, cette charmante ville où tout le monde connaît tout le monde et a des raisons pour le détester sans forcément l´avoir rencontré au préalable.

Mais ce n´est pas le propos. Parce qu´alors donc, j´étais hors de moi. Et ça m´a donné envie de rappeler une chose, puisqu´on est avant tout sur un blog parlant de musique. Même si Kundera mon amour voit d´un oeil critique le fait qu´on ne retienne de cette grande oeuvre qu´est la Neuvième de Beethoven seulement ces quelques pages qui sont, on se demande pourquoi parfois, devenues l´hymne de l´Europe. Quelque part, oui, nous nageons dans le kitch. Mais ce même grand homme ne dit-il pas que „La fraternité de tous les hommes ne pourra être fondée que sur le kitch“? Et quelque part, je suis certaine qu´il ne pouvait pas considérer ce sublime assemblage de mots comme une manifestation de JustinBieberite.

Ladies, Gentlemen, pour la énième fois, écoutez, et surtout, comprenez, l´Ode an die Freude, sublime mise en musique de Schiller par le vieux ronchon sourd. Et bien que ça m´ennuie de mettre la version Wikipédia, ça reste une traduction correcte (que je serai ravie de repréciser en privé; je tiens á signaler que ça me remue de partout et qu´en parler pourrait donner des effets bizarres).

En somme, FUCK LES RAGEUX : Alle Menschen werden Brüder.  

15 octobre 2013

Chers loutrons, Aujourd´hui, nous évoquerons un

Chers loutrons, 

Aujourd´hui, nous évoquerons un sujet crucial, d´une manière pertinente +++. 

Lol.

Bon, si, quelque part : aujourd´hui, point d´opéra, point de classique, mais un sujet musique, société et OMGWTFBBQ. C´est en effet influencée par l´écoute, lors du cours "Spur des Klangs. Für eine andere Musikästhetik" (aussi connu sous le nom de "Le cours où j´ai compris quand il a parlé du Traité d´orchestration de Berlioz mais sinon moyen") (celui directement après "Le cours où le prof m´a posé une question et j´ai répondu "Je suis pas sure, mais je crois que oui" alors que je sais pas du tout de quoi il parlait"), un sublime mashup entre Bootylicious des Destiny´s child et Smells like teen spirits, que je me suis mise à écouter de la musique de merde en rentrant chez moi. Et pas du tout parce qu´en vrai, j´aime la musique de merde.

Comme je n´étais pas occupée à faire mes trucs de pseudo musicographe - ce que nous appelons dans notre langage "Essayer d´écrire un mémoire de M2 qui ressemble plus á du Mongrédien qu´á du Marc Lévy" -, j´ai fait un tour sur la Page pute. Ladite Page pute, qui présentait ceci. Qui ne sera pas notre sujet du jour, puisque malgré le fait qu´on pourrait y redire deux trois choses sur la perception de la culture asiatique, sur les pandas pédophiles et sur l´usage de drogues par les enfants, reste une petite chanson passablement mignonne, que je beuglerai probablement la prochaine fois que l´abus d´alcool me poussera à me jeter sur des mets atrocement graisseux mais néanmoins raffinés, même si personnellement, dans ces moments là, je suis plus falafels que chinois, en partie parce que c´est moins cher, mais elle s´en bat la race, cette petite conne, puisqu´elle a 13 ans á tout péter mais que c´est déjà une mini star, et qu´en plus d´etre nourrie logée et blanchie par papa et maman, ce qui fait qu´elle ne se retrouvera pas avant quelques années face au drame de la culotte en dentelle déchirée par le sèche-linge, pétasse, et que par conséquent, elle met de l´argent de coté, plein d´argent, et qu´elle n´aura pas besoin de manger des pâtes aux pâtes parce qu´elle aura claqué sa bourse mensuelle au Forever 21, FACE DE TEUB. 

Oui, donc, cette chanson est mignonne, cette gamine est mignonne, et jusque là tout va bien. Le problème, c´est qu´aprés avoir écouté ça, je suis tombée dans la spirale infernale de la teen pop. Banal problème de chaine youtube. C´est bien quand il s´agit de Songs from liquid days (monsieur qui a ajouté cet album, je te bénis sur environ 32 générations), mais dans le cas de Alison Gold (qui n´est pas Alison Leslie Gold, une meuf qui a travaillé sur l´Holocauste et qui va recevoir plein de visites sur son site grâce á la morveuse), c´est la chose la plus hypnotique et contre-productive qui soit. Oui, j´ai tout regardé. Oui, je veux une médaille. Parce que maintenant, je suis vaguement désespérée. Et pas parce que ces enfants ont la gloire que je n´ai que trois fois dans l´année quand je viens de raconter une blague que les gens autour de moi ont sincèrement trouvée drôle. Je suis désespérée, parce que : 

- Sophia Grace. Non, petit loutron, tu ne rêves pas. Il s´agit probablement d´un croisé entre Nicky Minaj, Joey Starr et Miley Cyrus quand elle n´avait pas découvert le pouvoir du fessier. Le point positif, c´est qu´ici, la petite n´est pas hypersexualisée. Cette phrase me faisant rire nerveusement : il s´agit en effet d´une gamine de 10-putains-d´années, fait qui pourrait sembler suffisant pour qu´il paraisse évident à tout le monde que le clip ne mettra pas son déhanché et ses non-nibards en valeurs. Ce n´est évidemment pas le cas. Donc, même si ça pique un peu, je le dis, bravo les réalisateurs du clip, je n´entendrai pas mes potes dire "Elle est bonne, quand même". Youpi. Mais si il n´y a pas hypersexualisation, il y a néanmoins putain de sexualisation. Tu sais, le fait de faire rentrer dans la tête des gamines que "girls just gotta have fun" dans des voitures roses en robe, et draguer des garçons au goûter hihihi. Le genre de truc qui te fait rentrer direct dans une grande école, en somme. Et pour la suite, "Boys just gotta work"? "Mums just gotta clean"? "Otters just gotta rape seals"? Oui, c´est mignon, c´est rigolo, et cette gamine groove un milliard de fois plus que moi. Mais pourquoi lui coller ce texte? Pourquoi déjà proposer à son public une conception clichée de la féminité, à un âge où avant d´appartenir á une catégorie définie par leur sexe, ils sont des enfants? Ça serait seulement mignon et rigolo si ce clip était une exception avec un peu de second degré dedans. Là, ça me chiffonne. 

- http://www.youtube.com/watch?v=yGpU_zSvaPk. 9 ans, selon la chanson. La """"chanson"""", si on peut nommer comme ça quelque chose qui s´appelle Girl swag, ce mot n´étant légalement autorisé que lorsqu´il s´applique á une tortue (oui je fais des blagues sur Nabilla parce que je suis amoureuse d´elle). Un peu moins girly ici, même si les garçons jouent au foot et font du skate pendant que les filles dansent. Mais á la limite, elles dansent en mode gangsta, donc on est pas trop dans un contexte de sois sage et reste dans ta case sexuelle. Ici, ce qui me chagrine, c´est le texte. "I don´t need nobody like you (le couplet parlant d´un quelqu´un qui parle dans son dos), I don´t need no friends". La remarque se serait donc également appliqué s´il s´était agi du boy swag : QUI a eu l´idée de faire chanter á une gamine de NEUF ANS "Je n´ai pas besoin d´amis parce que j´ai le swag"? Encore une fois, ça ressemble á ce que je pourrais sortir au bout du quatrième Moscow Mule. Mais, bordel, comment peut-on être con au point de mettre dans la tête des enfants que leur attitude cool est plus importante que le fait d´avoir des amis? Les chansons de mini-loveurs/euses faisant passer l´amour avant tout me tapent sur le système. Là, j´ai des envies de meurtre. Heureusement que j´ai du Ritter Sport Nugat sous la main, sinon ça aurait grave chié. 

- Last but not least : Hannah Rose. Celle-ci, c´est la spéciale "message contradictoire qui rend fou". En effet, la petite dit que tu es parfait(e) au naturelle et qu´il ne fait rien changer, surtout pas pour les autres parce qu´on les emmerde grave (en gros). Ce qui est, quand même, grave bien, quand on sait que les gamines commencent á se trouver moches et grosses atrocement tôt (et des fois c´est vrai mais c´est pas quelque chose dont elles devraient avoir á se préoccuper parce qu´aprés elles ont des complexes jusqu´au jour où elles découvrent Simone de Beauvoir). Le problème est petit, mais néanmoins présent. Puisqu´elle chante son machin avec conviction ... Maquillée. Et pas maquillée parce qu´il faut bien mettre du fond de teint à cause des lumières plateau. Non, maquillée en mode minimiss, avec des grosses lunettes de soleil, des bijoux et des poses d´adulte. Malaise. Et ensuite, confusion. Tu dois donc t´aimer telle que tu es parce que tu es parfaite, MAIS avec du maquillage et le bon look. Si elle m´avait vu à son âge avec mes vêtements choisis par ma mère dont tout le monde se moquait, mon surpoids et ma grâce naturelle en cours de danse, elle ne m´aurait probablement pas chanté ça. Donc, comme pour les grandes : pour pécho, sois toi-même, et remets du fond de teint. 

Il y a plein de chansons sur cette chaîne, et c´est à peu près la même came. Je détaillerais bien, sauf qu´á cause du drame de la camomille*, mon lit commence á me tendre ses bras. Ce n´est pas un article pour dire que, ma pauv´dame, y a plus de jeunesse : j´ai joué aux Barbies en écoutant Britney bien avant les Jeunes Denojours, ce qui ne m´a pas empêché de grandir normalement (au détail près que je n´ai découvert que j´aimais le foot et la bagarre que l´année dernière, mais mieux vaut tard que jamais). Par contre, quand ça fait quelques années qu´on dit que le marketing genré c´est pa vraiment une source d´épanouissement, on pourrait s´attendre á ce que la musique par et pour les enfants les incite un peu plus à s´intéresser à autre chose qu´à leur nombril rose ou bleu, et leur transmette d´autres valeurs que "nique les autres t´es mieux fringué qu´eux". Je propose donc qu´á présent, ils soient éduqués á la musique par les symphonies de Mahler. Et si ils sont méchants, Boulez.

* Le drame de la camomille ou "Des fois je suis conne comme une bite, et encore, j´ai rencontré des bites plus intelligentes" : depuis trois jours, je suis malade, genre, comme un iench. Aujourd´hui j´ai cru que j´allais m´écrouler en rentrant chez moi, ce qui n´aurait pas été fun. Après j´ai voulu me faire une tisane. Et là j´ai vu qu´en fait ça fait une semaine que je buvais tous les jours une tisane avec de la camomille dedans alors que je suis intolérante et à chaque fois je suis super malade. Oui j´ai essayé plein de fois pour être sure. Alors maintenant je suis fatiguée. Voilà. 

7 octobre 2013

Mes chers chatons, Ceci est un avertissement

Mes chers chatons,

Ceci est un avertissement préliminaire : étant en possession depuis peu d´un clavier qwertz, je sais pas trop faire les accents et tous les trucs chelous qu´on a dans notre belle langue de la France, et si ça vous plaît pas c´est la même chose.

Á l´origine, je comptais raconter en long en large en travers par devant par derrière (non, ce n´est pas la nouvelle chanson de Booba) comment voir Nabucco en vrai c´était de la balle. Parce qu´il y a énormément de choses à dire sur cette production. Par exemple, que si comme moi, vous pensiez que le Va pensiero n´était qu´une belle page de musique parmi tant d´autres et que les italiens avaient juste craqué leur slip en 2011, vous vous plongiez allégrement le doigt dans l´oeil jusqu´en Australie. Quand tu réalises que non seulement, tu es en train de ruiner ton maquillage depuis que le choeur a commencé, mais qu´autour de toi, tout le monde, et pas tout le monde-ma-voisine-de-gauche, non, tout le monde, les adolescents qui cinq minutes avant se bousculaient en riant, les vieux qui leur râlaient dessus, ceux des Stehplätze a.k.a. les pauvres a.k.a. moi, ceux du parterre a.k.a. ceux qui payent 185 euros, et les autres, tout ce monde, donc, renifle, se mouche, voire sanglote pour un vieux monsieur devant moi. Et pour une fois, ne pleurent pas chacun pour soi parce qu´à la fin le petit cygne meurt et c´est triste, ou parce que voir La Bohème quand on vient de se faire téj ça fait un peu mal, mais pleurent universellement. Oui, universellement. Si j´avais pas plein de trucs à dire aujourd´hui, je repartirais dans mes explications sur l´ame commune (tout en mettant à profit quelques années de théâtre : " Les corps des êtres vivants se sont réduits en poussière et l'éternelle matière les a mués en pierres, en eau, en nuages ; et leurs âmes se sont fondues en une âme unique…L'âme universelle, l'âme du monde, c'est moi" - oui, on vient de passer de Verdi à Tchekhov, je fais ce que je veux, vous n´etes pas mes pères), présente également lors des matchs de foot et de la messe. Mais on a pas le temps, et c´est un peu chiant, aussi.

De cette folle production, nous retiendrons également Jennifer Wilson, la dame qui chantait Abigaille. Déjà, parce que Abigaille est sûrement un de mes rôles préférés chez Verdi, parce que le personnage a des couilles - à un détaille près : comme c´est une femme, elle a beau être assoiffée de pouvoir et sans scrupules, elle a quand même un point faible. Indice : c´est ce qui gouverne toutes les femmes (non). Car dés que son amoureux-mais-c´est-pas-réciproque-parce-qu´elle-a-plus-de-couilles-que-lui approche, elle se transforme magiquement en Flamby. De chez Aldi. Dans la téci. Avec Lord Kossity.

Pardon, j´ai écouté trop de rap français ces derniers temps.

Bref, femme = éternelle amoureuse, mais en même temps, XIXéme RPZT, on peut pas leur demander de mettre Simone de Beauvoir en slip comme personnage principal. Jennifer Wilson, donc. Pendant tout l´opéra, je me suis dit que je tuerais des bébés loutres pour entendre cette femme dans Wagner. Et là j´ai réalisé que mon voeu avait été exaucé (mais sans les bébés loutres) puisque c´est elle que j´ai vu dans le Götterdämmerung au festival de films cet été. Dans cette version, pour être précise. Le reste de la production m´avait, comment dire, enfin le décor était très moche et puis Siegfried, hum ... Si une autre version est disponible, elle sera forcément mieux. Mais cette voix, mes chatons, fait oublier le costume hideux de Brünnhilde. Je suis prête à prendre 20 kilos pour chanter comme ça. Voire 30.

Voilà pour Nabucco. Ensuite j´ai vu Simon Boccanegra, et je me suis dit que quand même l´opéra de Vienne passe UN PEU TROP de Verdi  (à suivre en octobre, Aida, Don Carlo, et un gala Verdi). Je sais pas si il couche avec ou comment ça se passe mais c´est bizarre. Et pour ceux qui diront que bicentenaire blablabla, je dirai que oui mais Wagner aussi, et ils jouent pas Wagner trois fois par semaine. 

Ah, en fait, tant mieux. Va pour Verdi.

Simon Boccanegra est un opéra en trois actes et un putain de prélude. Pourquoi tant de vulgarité? Parce que si musicalement, ça reste du bon Verdi, ce prélude compte parmi les What the fuck de l´histoire de la musique. En un temps record, on apprend que Gènes est le théâtre de luttes politiques entre patriciens et plébéiens mais que Simon le pirate plébéien aime Maria la fille du doge patricien et lui a fait un gosse du coup  Maria est enfermée et là y a Paolo qui complote pour que Simon soit le nouveau doge sauf que Maria est morte donc son père est triste et il trouve que c´est la faute de Simon mais Simon n´est pas au courant alors il s´instroduit dans la maison et découvre son cadavre et le doge dit bien fait pour sa gueule sauf que la fille de Simon et Maria vivait dans une cabane au bord de la mer avec une vieille mais elle est morte alors la gamine a disparu donc Simon est super déprimé, et le doge dit que ce sera pas la paix tant qu´il aura pas vu sa petite fille ce qui à mon humble avis est un peu con, ça se fait pas de prendre des décisions politiques en se basant sur des enfants enfin je trouve ça chelou mais après c´est pas moi qui décide, et là d´un coup la foule débarque sur scène et emporte Simon qui a été élu doge alors qu´il est encore en train de pleurer. En gros. Peut-être que c´est parce que des fois que je suis bête, mais ça me parait légèrement trop chargé, cette histoire. Le reste de l´opéra est bien bien cool et à la fin il meurt. Un jour je vous parlerai d´opéras qui finissent bien. J´avais envie de faire des choses pas catholiques á Adam Plachetka qui chantait Paolo. Oui, c´est utile de le préciser.

Ensuite j´ai cassé mon ordinateur et j´en ai racheté un au rabais qui datait des années 50 et qui se déconnectait d´internet toutes les dix minutes alors fallait le redémarrer du coup c´était un peu bête. Après ma fac m´a dit que j´étais pas inscrite alors j´aurai pas mes bourses Erasmus et je devrai rentrer et travailler de nouveau au Macdo, sauf qu´en fait non c´était une vanne et on a bien golri même si j´avais un peu envie de sauter par la fenêtre, j´habite au dernier étage alors autant en profiter. Ensuite je suis allée à un cours et la dame a dit "Ah ben non tu peux pas venir parce que t´étais pas là l´année dernière alors ton cours à 7 ECTS tu te le mets dans le cu l´oreille" alors j´ai du choisir deux cours qui m´intéressent moins à la place et je dois emmerder tout le monde pour changer mon contrat d´étude. Après mes darons m´ont fait un virement pour que j´achete un ordinateur sauf que chez Planet Saturn ils prennent pas la carte bancaire alors j´ai retiré du cash mais y avait un plafond et il me manquait 5 euros alors j´ai du attendre deux jours avec mon porte monnaie plein de biftons. Ensuite c´était ce matin et je suis allé à un cours sur les automates musicaux et déjà j´avais dans la tête le final de l´acte d´Olympia qui tourne en boucle cimer c´est un peu relou, mais en plus le type ne parle pas mais murmure et a un accent autrichien super gros, un peu comme la bite de mon prince charmant imaginaire, alors je comprends le sujet, le verbe mais pas la fin de la phrase donc mon cours est écrit en kamoulox. Mais cette semaine de la loose a plus ou moins été compensée par le fait que vendredi, on a fait la fête dans une boite/palais avec des tableaux, des lustres, des étagères avec des bouquins qui ont quelques siècles et tout autour des gens qui s´entre-volent le larynx en se bavant dessus sur fond de dance musique, et un peu de Ricky Martin. Et que samedi étant la nuit des musées, pour 11 euros, on a vu le Mumok (aussi appelé Musée des tableaux que t´aurais pu faire toi même mais en mieux), le musée de l´Esperanto (où on est allées pour le Lol mais en vrai il est grave intéressant), le musée des globes (où on est allées pour le Lol et ça a bien marché), le musée de la torture (qui ne serait pas atroce si tous les mannequins subissant lesdites tortures n´avaient pas des visages atrocement creepy) et un bout du musée d´histoire naturelle (j´aime les animaux empaillés). Ça nous donnerait donc, vu que 4 trucs très pourris + deux trucs très biens qui comptent doublent, une semaine normale. Sauf qu´entre temps, on m´a fait découvrir la plus belle chanson du monde alors c´est devenu une bonne semaine.

 

24 septembre 2013

Otello

Point info pour te la jouer en soirée : Othello, the Moor of Venice est une pièce de Shakespeare créée en 1604, et Otello, un opéra de Verdi créé en 1887. 

Je me vois dans l'obligation de commencer ceci par une information cruciale, qui pourrait potentiellement peser sur l'objectivité de l'auteur (pardon, l' "auteur") (on me dit dans l'oreillette que j'ai même le droit de dire "auteure", mais ça rend le mot moche) : je déteste Othello - la présence de ce h étant à souligner, puisque c'est dans la lecture de l'oeuvre de Bill le Barde que cette antipathie prend racine. Pourtant, l'argument avait tout pour me plaire : nous nous retrouvons face à l'équation permettant de résumer une grande partie des pièces/opéras/livres, que de brillantissimes scientifiques, après des années de recherche, ont énoncé en ces termes : sexe + histoire de cul = meurtre. Otello (adoptons la version opératique, ça fait une lettre en moins à taper, et en ces temps de crise, il n'y a pas de petites économies) est un général content parce qu'il vient de vaincre les turques. En plus, malgré sa vieillesse, il est marié à une bonasse, qui répond au doux prénom de Desdemona, mais aussi quand on la siffle. En somme, la vie est belle pour notre Maure préféré. 

Mais. MAIS. Il se trouve que certaines personnes sont jalouses : Iago, son officier, est fâché parce qu'Otello a donné le grade qu'il convoitait à un autre, et Roderigo, un noble, veut se cogner Desdemona. Du coup, Iago va monter un plan diâââbolique pour se venger, et à la fin tout le monde meurt. Comme j'ai la flemme de détailler cette histoire, les chatons qui ne la connaissent pas sont priés d'aller faire un tour sur Wikipé ... Pardon, d'aller ouvrir le Grove Book of Operas. Car ce qui nous intéresse aujourd'hui, ce n'est pas l'intrigue en elle-même, mais l'approche d'un personnage en particulier. Mesdames et Mesloutres, Mesloutres et Messieurs, merci d'applaudir bien fort Iago, ou le Méchant en carton. 

D'emblée, je t'entends, public, crier au blasphème : Iago est en effet réputé pour être un personnage particulièrement classe, parce qu'il n'est que haine et noirceur, et qu'on n'a pas attendu Dark Vador pour trouver que se balader du côté obscur était plus intéressant que gambader tous les jours avec les licornes. Chez Iago, pas une once de pitié, et j'irais presque jusqu'à dire, pas une once d'humanité. Souvent, ça donne des rôles intéressants : on parlait justement l'autre jour de Scarpia, qui est une réussite dans ce domaine. Alors avec Iago, méchant since 1604, on s'attend à tomber sur quelque chose de consistant. Mais tiens, le voilà qui monologue à la scène 2 de l'acte II, posons-lui la question!

Alors Iago, pourquoi êtes-vous si méchant?

- "Son scellerato perchè son uomo; e sento il fango originario in me." (Je suis un scélérat parce que je suis un homme, et je sens la boue originelle en moi)

Ah ouais ... Mais ça vous est venu comment?

- " Dalla viltà d'un germe o d'un atomo, vile son nato." (Je suis né vil de la lâcheté d'un germe ou d'un atome)

Quand même, vous devez bien avoir une ou deux petites valeurs?

- "Credo con fermo cuor, siccome crede la vedovella al tempio, che il mal ch'io penso e che da me procede, per il mio destino adempio." (Je crois d'un coeur ferme, comme le croit la jeune veuve au temple, que le mal auquel je pense et qui vient de moi est mon destin)

C'est bien beau, mais le paradis, la vie éternelle, tout ça, ça vous branche pas? 

- "La morte è il nulla. È vecchia fola il Ciel!" (La mort n'est rien, le ciel n'est qu'une vieille fable)

Hum. Sinon, à part énoncer des lieux communs, il fait quelque chose, le Iago? Certes, on a rarement le profil psychologique complet des personnages, et leurs actions peuvent parfois paraître obscures. Mais là, on a un type qui, dans son grand monologue, endroit où en théorie le personnage gagne un peu en profondeur, explique qu'il est méchant parce qu'il est méchant. Il fait même mieux : tellement il est vilain, il invoque Satan ("Aiuta, aiuta Satana"). Pourquoi pas, mais dans ce cas, chanteur, pitié, ne surjoue pas en rajoutant un grand mouvement de bras sur le mot "Satana". Juste, c'est nul. C'est comme si j'écrivais Aiuta Satana. C'est vraiment pas esthétique et c'est totalement superflu. Et surtout, chanteur, je te demande ça à genoux : NE TE PLANTE PAS AU MILIEU DE LA SCÈNE LES BRAS CROISÉS PENDANT TON MONOLOGUE POUR MONTRER À QUEL POINT TU ES MÉCHANT ET PUISSANT. Ce n'est pas esthétique non plus, et en plus, après, on a l'impression que tu ne sais pas jouer (ce qui est faux, puisque dans l'ensemble le gaillard était bon) (c'était lui). Si tu recommences, on te met sur scène avec la Lady Macbeth de Nancy

J'en étais où? Ah, oui, pourquoi Iago est méchant : 

glory  

Oui parce que taper sur le chanteur c'est bien gentil, mais c'est le personnage en lui-même qui pose problème. C'est la raison principale pour laquelle je n'aime pas la pièce de Shakespeare. Ce qui pose problème, ce n'est pas tant l'absence de véritable justification de ses actes (d'autant plus que comme on est pas cons comme des bites, on a pas besoin qu'il nous fasse un dessin pour comprendre que c'est encore un mec assoiffé de pouvoir et jaloux de tous ceux qui réussissent mieux que lui, vaguement sociopathe sur les bords, et qui torture probablement des hamsters à ses heures perdues), mais plutôt la qualité du livret. On peut dire des choses très plates à l'opéra. C'est même ce qui arrive la plupart du temps - si tu places un air qui explique point par point le conflit israélo-palestinien, ça risque d'être encore plus chiant que du Boulez. Cependant, si le fond peut être un peu vague, on est en droit d'attendre une forme sinon irréprochable, du moins intéressante. Le problème du monologue de Iago, c'est qu'il est atrocement plat; l'utilisation du Credo, pourrait amener quelque chose d'intéressant. C'est du blasphème, pour l'époque c'est un peu provoc', on va bien en faire quelque chose? Non. Même musicalement, ce qui aurait pu être un moment de terreur intense face au mal absolu pour le public n'atteint qu'un score de 3,5/10 sur l'échelle du twerk de Miley Cyrus. 

Ce qui me chagrine, c'est que le reste de l'opéra vaut le coup : le rôle de Desdemona est beau (surtout quand elle sait qu'elle va crever), les duos (dui?) entre elle et Otello sont bien écrits. Et le premier acte, ah, le premier acte : même si je n'ai pas totalement adhéré à la mise en scène viennoise (très impressionnante esthétiquement, mais un peu trop contemporaine, et un éclairage tenu par Captain Obvious : quand Iago est en colère, les lumières deviennent rouges), ce foutu de putain de premier coeur m'a laissé toute pantelante. Après ils se bourrent la gueule et ça m'a fait penser aux soirées Erasmus alors j'étais contente. 

Conclusion? Envoyons Iago dans Les anges de la téléréalité. Son argumentation étant à peu près aussi évoluée que celle de Nabila quand on l'interroge sur ses objectifs dans la vie, y a moyen de rigoler un peu. 

Sinon, j'ai eu une conversation de au moins 3 minutes en allemand avec mes voisins d'opéra, et ils se sont même pas sentis obligés de passer sur l'anglais. Bravo moi. 

 

17 septembre 2013

Carmen

Ou plutôt : 10 raisons d'aimer Carmen même si c'est super mainstream.

"Parce qu'à la dernière scène Roberto Alagna avait sa chemise ouverte" ne fait pas partie de ces raisons. Enfin, si, mais je ne m'attacherai pas ici à décrire la (géniale) version à laquelle j'ai assisté, ce qui serait totalement con pour traiter Carmen de manière générale. Or, je ne suis pas totalement conne. Et oui, il m'arrive de fantasmer sur Roberto Alagna, comme sur la majeure partie de l'espèce humaine, et sur certaines loutres. La prochaine fois, nous chercherons 10 personnes sur lesquelles je ne fantasme pas. Ça sera très difficile, mais nous arriverons à surmonter cette épreuve ensemble. 

Oui, je l'avoue : par certains côtés, je suis atrocement snobe. Il m'arrive d'avoir du mal à assumer d'aimer certains opéras, pour la bonne et simple raison que ce sont les seuls que l'individu lambda connaîtra vaguement. Il sera même en général capable d'en fredonner un morceau. En l'occurence, la putain de Habanera. Alors, je me dis, fi, admettons que ce petit opéra est bien charmant, et allons écouter du plus pointu que personne n'aime - je suis une future musicologue, merde. Évidemment, je suis la première à admettre que c'est une attitude atrocement conne. Et ce soir, Staatsoper chéri, grâce à toi, je me suis réconciliée avec l'un des opéras les plus joués au monde. Il était temps. 

1) Mérimée. Parce que Carmen, avant d'être un opéra (1875), était une nouvelle de Prosper (1847). Mérimée, contrairement à Bizet, est vraiment allé en Espagne. Il en a ramené pas mal d'observations couleur locale, et une fascination pour la canaille : si en France, notre petit peuple est con, ce n'est pas le cas là-bas, où la pauvreté pousse à développer la ruse et l'intelligence (et je schématise à peine son propos). Forcément, ça fait de bons personnages, qui passent la nouvelle à rouler le narrateur, mais il les aime bien quand même, et nous aussi. Voir Carmen donne envie de se replonger dans l'oeuvre de ce type qui, bien qu'il ait un prénom moche, est un très bon auteur, et un encore meilleur chroniqueur. Surtout quand l'automne arrive : à cette heure ci, il pleut des cordes à Vienne, et si mon coeur lorrain y trouve son compte, les plus frileux pourront invoquer le soleil espagnol grâce à leur tablette I-machin. 

2) Micaëla. Quand on pense à Carmen l'opéra, on ne pense qu'à Carmen la meuf. Forcément, c'est, en plus du rôle principal, un personnage particulièrement charismatique, qui a droit aux les airs dont la mélodie reste en tête pendant des heures. Et on a tendance à oublier Micaëla, la petite Micaëla, le seul personnage au coeur pur. Car ne nous voilons pas la face : dans cet opéra, tout le monde pense avec sa bite. Carmen ne s'en cache pas, puisque même quand elle se déclare amoureuse, elle continue de préciser "pour l'instant", ce qui a le mérite d'être honnête. Le cas de Don José est un peu plus compliqué : si il trahit l'amour de sa petite fiancée, c'est parce qu'il est devenu fou de Carmen, et il restera constant dans cette folie pendant le reste de l'opéra. OUI MAIS. José est, dans son genre, pas mal psychopathe : quand Carmen le supplie de la laisser partir car les sentiments entre eux sont morts, argument plutôt sensé (eux deux, puisqu'on réalise assez vite que l'amour de Don José s'est transformé en haine, et qu'il en a marre de cette gitane à la con qui change de mec comme de chemise), il se colle à elle non pas parce qu'il l'aime, mais parce qu'il ne supporte pas de la voir partir pour un autre, et de se retrouver ainsi dans son panier à linge sale d'exs. On a déjà vu plus pur comme sentiments. Mike n'apparaissait pas dans la nouvelle, et a plus ou moins été rajoutée pour offrir un contraste avec l'immoralité des autres personnages, mais aussi pour montrer, à l'acte I, qu'avant de tâter de la bohémienne, le joli brigadier était un type bien. Elle en devient presque caricaturale (presque, puisque malgré tout, le personnage fonctionne très bien). C'est la fille gentille et courageuse qui n'hésite pas à se balader toute seule dans les montagnes pour dire à son ex-fiancé devenu bandit que sa vieille mère est malade. Grâce à elle, Don José pourrait avoir le choix de la rédemption, ce qui empêche d'éprouver de la compassion pour lui une fois qu'il a rejetté cette possibilité, pour s'enliser dans sa passion pour Carmen. Micaëla, c'est une représentation d'une autre fin possible, avec des tresses. 

3) L'air de Micaëla à l'acte III. Hier soir, c'était Anita Hartig qui tenait le rôle, et il n'y avait pas une seule phrase qui n'était pas parfaite musicalement (la diction c'était moins bien, mais elle est encore petite). La version d'Anna Moffo est très bonne. 

4) Carmen ou je fais ce que je veux avec ma vulve. Tout le monde connaît son texte : Si tu ne m'aimes pas, je t'aime, si je t'aime, prends garde à toi. Cette phrase, devenue cliché à force d'être répétée par toutes les grognasses depuis plus d'un siècle, reste quand même un putain de manifeste pour le droit de s'amuser comme on veut avec qui on veut. Mais elle ne défend pas que ses pratiques sexuelles : ce que Carmen met au dessus de tout le reste, c'est la liberté. Sa lutte pour ne jamais être soumise trouve son apogée dans la mort : lorsqu'on arrive au troisième acte, elle sait très bien que le choix qui s'offre à elle est vivre et suivre José, ou mourir et rester libre (parce qu'elle l'a lu dans ses cartes, mais aussi parce qu'elle a un minimum de bon sens. Même ses amies gitanes le voient venir gros comme une maison). Que dit Carmen? "Jamais Carmen ne cédera, libre elle est née, libre elle mourra". Décidément, les opéras sont remplis de bonnes baselines. Dans la vraie vie, il n'est pas forcément nécessaire d'aller jusqu'à ce type de comportement, mais l'idée qui dirige le personnage de la gitane est intéressante. Carmen assume d'avoir "des galants à la douzaine" et fait de sa vie un jeu permanent. Carmen préfère mourir plutôt que de suivre un homme qu'elle n'aime pas. Ce que j'y vois, c'est une femme qui, en respectant la ligne de conduite qu'elle s'est fixée, se respecte. Inspirons nous plus souvent de Carmen dans nos vies professionnelles en nous fixant une règle de conduite absolue : par exemple, je préfère mourir que citer une ligne de Marc Lévy. "Jamais Bérengère ne cédera, avec un minimum de bon goût elle est née, avec un minimum de bon goût elle mourra".  

5) Le livret. Meilhac et Halévy les chatons. Je suis amoureuse d'eux pour les livrets d'Offenbach, qui sont toujours des monuments de connerie, avec un humour plus ou moins douteux. Mais ce sont également eux qui sont derrière le livret de (changement de registre WTF) Manon. Dans Carmen, il faut avouer que si c'est pas du Hugo, le texte est simple, mais efficace. Je ne vais pas re-citer les paroles de la Habanera, qui enchaîne tellement de lieux communs qu'elle en devient une vérité universelle. 

6) Bizet et l'ouverture qui donne envie de twerker. Tout simplement. Un peu comme le final de L'Arlésienne. Et j'ai trouvé mon âme soeur dans les commentaires de cette vidéo : "Best drinking game every time you hear a loud bang take a drink!". 

7) La liesse populaire. J'aime, que dis-je, j'adore, les gros choeurs. Si en plus il y a des percussions en même temps, mon petit palpitant a du mal à se retenir d'exploser. C'est aussi pour ça que je suis amoureuse d'Offenbach, qui met une foule et des cloches au moins vingt fois par opéra. Outre le fait que ces passages réveillent plus que trois litres de Club Mate, j'admire le fait que pour les apprécier, il ne faut pas avoir fait dix ans d'études musicales, il ne faut même pas prêter une oreille attentive : dans ces moments, ce n'est pas à toi d'écouter la musique, c'est la musique qui vient te capter - un peu comme les musiciens dans le métro, sauf que avec de la vraie musique. Ou dans un autre registre, comme les dealers de drogue sur les ponts viennois. Si à la place de m'apprendre la putain de flûte à bec au collège, on m'avait passé le début de l'acte II (Les tringles des sistres tintaient - et encore une belle trouvaille littéraire pour le titre), je n'aurais probablement pas attendu la Terminale pour arrêter de détester la musique classique. La face du monde ne s'en serait pas trouvé changée, mais ma moyenne de licence, si. Et ça m'intéresse plus que la face du monde. 

8) Le prélude de l'acte III. Ça repose. 

9) Cocorico. Quand on regarde les statistiques des opéras les plus joués dans l'année, les quatre premiers sont toujours les mêmes, se contentant d'échanger leurs places entre eux. D'après ce que j'ai trouvé, pour la saison 2012-2013, on avait en premier La Traviata, puis Carmen, La Bohème et La Flûte enchantée. Carmen navigue donc entre la première et la quatrième place depuis la nuit des temps (à peu de choses près). Ensuite, il faut attendre la 34ème place pour retrouver un compositeur français (Faust de Gounod, immédiatement suivi par Les Contes d'Hoffmann). Rien que pour garder un opéra français dans le top, il faut continuer à aller voir Carmen. 

10) Le mainstream, en fait, c'est bien. Déjà, parce que si trois passages de cet opéra sont connus du grand public qui les réutilise à toutes les sauces jusqu'à l'écoeurement, ce sont toujours trois passages d'une oeuvre de la scène lyrique qui sont connus de tout le monde. Même si les mecs ne se souviennent pas forcément du compositeur ni de l'oeuvre, ils connaissent. Et souvent, apprécient. Tout en préférant Justin Bieber, mais c'est là. L'important n'est pas de se mettre à écouter uniquement du classique, mais de savoir que cette musique n'est absolument pas réservée aux initiés. Et puis, il y a une chose qu'il ne faut pas perdre de vue : si le grand public est parfois un peu bovin, il n'empêche qu'il se trompe rarement. L'exemple qui me paraît le plus frappant pour ça, c'est le Boléro de Ravel (même si la prochaine fois que je l'entends je fais bouffer sa caisse claire au percussioniste). Ce qui plaît, c'est peut être l'idée du rythme obstiné que tu peux reproduire à la maison sur ton djembé, mais ça reste une putain d'incroyable étude d'orchestration. Si le mainstream permet de faire découvrir de grandes oeuvres à des personnes dont le kiff ultime n'est pas d'aller à l'opéra tous les soirs, alors je dis, vive le mainstream. 

Et puis faut pas croire, je m'intéresse aussi aux grandes oeuvres du répertoire moderne. Ça veut dire qu'hier j'ai écouté Booba et One Direction. 

 

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Sex, drugs and musique pré-romantique
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